mercredi 25 avril 2012

La langue ne ment pas (Victor Klemperer)


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Ce documentaire met en images les carnets de Victor Klemperer (Lingua Tertii Imperii, la langue du IIIème Reich). Universitaire allemand, il annote au quotidien les vicissitudes que lui fait subir en tant que "Juif" le régime nazi. Philologue, il prête une attention toute particulière au langage et à l'évolution du vocabulaire qui accompagne et renforce la stigmatisation et les brimades. Ce documentaire recouvre aussi un intérêt qui dépasse son contexte, puisqu'il rappelle à quel point "les mots font les choses" et le pouvoir social conféré à ceux qui ont réussi à prendre le pouvoir sur la langue.

Victor Klemperer a tenu un journal tout au long de sa vie. La partie qui couvre la période nazie a été publiée en Allemagne en 1995 avant d'être traduite en 2000 en français. Dans son Journal, il mêle les détails de la vie quotidienne, les observations politiques et sociales, les réflexions sur la nature humaine et sur la nature de la langue, toutes deux perverties par le IIIe Reich. Klemperer décrit les privations, les humiliations, l'asphyxie progressive de celui qui mène une existence de paria, les disparitions successives des amis. Il fait preuve d'une remarquable lucidité sur son sort, sur le sort de millions de Juifs dans les camps et affirme sa volonté de témoigner pour l'histoire.


L'allemand  permet de créer des mots composés et les nazis ne se sont pas privés de cette possibilité pour inventer des mots à même de servir leur propagande. Il y a donc eu une langue nazie. Ce sont les particularités de cette « novlangue » que Victor Klemperer a consciencieusement notées pendant les années du nazisme, ce qui lui servait aussi à garder son esprit critique et à résister individuellement à l'emprise du régime hitlérien.
Par exemple, les nazis ont beaucoup utilisé le préfixe Volk-, le peuple (ex : Volkswagen), parce qu'ils voulaient donner l'impression qu'ils servaient le peuple. Ils ont aussi remis au goût du jour certaines runes du Moyen Âge, c'est de là que vient le sigle en éclair des SS. Là, le but était de faire croire à toute la population que le nazisme n'était pas nouveau mais qu'il était issu de l'Allemagne ancienne, qu'ils incarnaient la vraie Allemagne. Et que sur les décombres de la crise de 1929 le IIIe Reich durerait 1000 ans.
Il souligne aussi l'importance chez les nazis du vocabulaire organique pour décrire la société comme un ensemble vivant, tendance préférée volontairement à une pensée systémique.
Klemperer souligne dans ses carnets toutes les possibilités d'asservir une langue, et donc la pensée elle-même, à l'œuvre de manipulation des masses

 


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